En veux-tu, en voilà! Au salon de l’auto de Pékin, qui s’ouvre aux professionnels mercredi et au public vendredi, l’électrification est incontournable. Parmi les nouveaux modèles de série, il y a les SUV électriques de GAC (en coopération avec Toyota). Mais aussi les hybrides rechargeables de BYD. Et, dans les concepts, Tesla se retrouve face à de nouvelles marques locales inconnues (Sitech, Aiways) qui se proposent de concurrencer la firme californienne dans le haut de gamme zéro émission… Cette agitation autour de l’électrification est logique. Le régime chinois a édicté en septembre dernier des quotas stricts de voitures à énergie nouvelle («NEV», comprenant les électriques et hybrides rechargeables). Ces véhicules devront représenter 10% des ventes de voitures neuves en 2019 puis 12% en 2020, précise le ministère de l'Industrie. Et le gouvernement veut que les véhicules électrifiés pèsent à l'horizon 2025 un cinquième des ventes totales en Chine.
2,8% du marché (rechargeables compris)
Quelque 777.000 voitures "NEV" ont été vendues en Chine en 2017, soit un bond de 53% sur un an. L’an dernier, les modèles électrifiés ont représenté 2,8% du marché, même si le calcul des pourcentages est aléatoire à cause du périmètre de ce qu’on appelle les «NEV». De nombreuses voiturettes électriques échappent au calcul car elles ne sont pas immatriculées comme des voitures. La CAAM (Association des constructeurs chinois) s'attend à ce que les «NEV» dépassent un million de véhicules (hors voiturettes) cette année. Les experts de PwC Autofacts, quant à eux, anticipent dans une étude parue la semaine dernière que le volume de production total des «NEV» dépassera 1,6 million d'unités en 2018 et atteindra les 4 millions en 2024. Il y a... visiblement des désaccords quant aux prévisions. Mais tous parient sur une forte expansion.
Le ministère de l’Industrie a annoncé par ailleurs fin mars qu’il travaillait à une amélioration des normes des véhicules électriques, notamment sur la recharge, la conception des batteries et leur consommation. Le pays s'efforcera notamment de promouvoir à l'étranger ses propres normes et critères de référence pour les véhicules électriques et les modèles électriques rechargeables !
Electricité produite avec du charbon
Pékin veut à la fois diminuer la pollution dans les grandes villes et... réduire sa dépendance vis-à-vis du pétrole importé en assurant son indépendance énergétique. L'impact écologique de ces mesures, du puits à la roue, risque toutefois de rester relativement faible, compte tenu de la production de l'électricité en Chine… qui se fait à 90% avec du charbon, une technique extrêmement polluante. L'objectif officiel de Pékin est de passer à 20% d'énergie produite avec des techniques à faibles émissions d'ici à 2030. Ce qui laisse encore 80% au charbon! Pas vraiment respectueux de l'environnement !
Pékin poursuit à travers ces mesures un troisième objectif sous-jacent, qui n'a rien à voir avec l'écologie: celui de fomenter une industrie nationale du véhicule électrique. Comme il l'a fait à coup de subventions publiques pour les bus «zero émission». Fortement encouragés par le pouvoir central, les constructeurs chinois ont déjà pris de l'avance, s’octroyant 95% du marché mondial dans les autobus. Pour la Chine communiste, la voiture électrique permet de préempter, via les batteries, un marché naissant afin de disposer d'un avantage compétitif, comme c'est le cas pour les panneaux solaires. "La moitié des capacités mondiales des batteries se trouvent en Chine, et bientôt ce sera les deux tiers ", constate Laurent Petizon, analyste au cabinet Alix Partners.