« Il faut vraiment rouler doucement. La poussière abîme les arbres. » A l’entrée de la ferme de Waterford, dans l’ouest de l’Afrique du Sud, Nhlanhla Ntshangase invite les visiteurs à la précaution. Ce gestionnaire agricole zoulou de 29 ans chérit ses avocatiers comme le plus précieux des minerais. « Je passe toutes mes journées avec eux. Je leur donnerais à tous un petit nom, si je pouvais ! », plaisante-t-il.
Fruit aux multiples vertus naturelles, idolâtré par les millennials (les 18-35 ans) et érigé au rang de star sur le réseau social Instagram, l’avocat connaît un engouement mondial. Comme dans plusieurs autres pays de l’hémisphère Sud, l’explosion de la demande engendre en Afrique du Sud un véritable essor de la culture du fruit vert.
Dans la première économie du continent africain, certaines régions au climat subtropical se prêtent parfaitement aux besoins de l’avocatier. En 2018, le pays est en passe de battre son record de production, qui devrait atteindre les 125 000 tonnes. L’avocat a généré un revenu de 64 millions d’euros pour la saison 2015/2016, ce qui ne représente que 0,5 % du total du secteur agricole. Mais ce revenu a augmenté de 440 % entre 2006 et 2016.
Ruée vers « l’or vert »
Chaque année, 1 000 nouveaux hectares sont plantés, qui viennent s’ajouter aux 17 000 déjà exploités. Une ruée vers « l’or vert » qui, comme toute production de fruits et de légumes tropicaux, a ses travers : tendance à la monoculture et appauvrissement des sols, transport réfrigéré et énergivore vers les pays du Nord, hyperconsommation d’eau, déforestation…
Apôtre de « l’agriculture régénératrice », Nhlanhla Ntshangase se situe aux antipodes des pratiques qui hérissent les écologistes. « Notre mission est de produire le fruit le plus sain possible en respectant au mieux la nature, affirme-t-il, en paraphrasant le slogan inscrit sur le panneau d’entrée de l’exploitation. On utilise le moins de produits chimiques et de fertilisants possible. Ce n’est pas complètement du bio, mais on s’y dirige. »
Au milieu du verger, où les avocatiers sont enracinés en lignes parallèles, le jeune homme tient absolument à montrer son « hectare expérimental ». « Ici, les arbres sont plantés avec du romarin, du thym, des radis. L’idée est d’assouplir la terre et d’avoir des micro-organismes qui font tout le travail, note-t-il. Je cherche au maximum à imiter la nature. Lorsque l’on interfère, on le fait de manière stratégique. » Plus loin, des buissons de basilic sauvage survolés par des abeilles permettent la pollinisation indispensable des arbres.
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