Retraite : les Français sont parmi les Européens les plus inquiets pour leurs vieux jours

Retraite : les Français sont parmi les Européens les plus inquiets pour leurs vieux jours
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Deux tiers des Français sont inquiets pour leur retraite, et la plupart ne savent pas comment la préparer. Les jeunes actifs semblent particulièrement mal armés...

Retraite : les Français sont parmi les Européens les plus inquiets pour leurs vieux jours
Crédit photo © Reuters

(Boursier.com) — A l'heure de la réforme des pensions, ING s'est penchée sur le sentiment des Français quant à leur retraite... Le résultat est moins brillant encore que dans d'autres pays. Les Français sont les seuls à trouver leur système à la fois insuffisant et injuste. Il apparaît aussi comme peu lisible et semble peu à même de permettre aux futurs retraités de calibrer correctement leur épargne pour pouvoir maintenir leur niveau de vie après la retraite.

Depuis plusieurs années, la banque ING sonde les ménages des différents pays où elle est active à propos de questions relatives à leurs finances personnelles. Ce sont les "ING International Surveys". Le volet "épargne" des enquêtes 2019 a été réalisé du 10 septembre au 10 novembre 2018 auprès de 15.000 ménages dans le monde, dont 1.000 en France. Les principales conclusions de cette enquête pour la France sont les suivantes :

Les Français sont inquiets pour leur retraite...

A l'heure de la réforme des retraites, ING s'est donc penché sur les inquiétudes des Français quant à leur niveau de vie une fois retraités et à leur comportement d'épargne face à la perspective du départ à la retraite. Il en ressort que parmi les pays d'Europe où l'enquête a été effectuée, les Français, avec les Espagnols, sont les plus inquiets : 67% se disent inquiets de savoir "s'ils auront assez d'argent lors de leur passage à la retraite".

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La moyenne de l'enquête est de 61%, et ce taux est beaucoup plus bas dans certains pays, comme aux Pays-Bas où cette question ne préoccupe que 40% de la population. Dès lors, pour ce qui est de laisser un héritage derrière eux, les Français sont logiquement assez pessimistes aussi : seuls 44% des Français pensent pouvoir le faire...

Beaucoup ignorent quoi faire...

Epargner, oui, mais combien et à quel rythme ? Le récent Baromètre de l'Epargne et de l'Investissement de l'Autorité des Marchés Financiers (AMF) montrait en effet qu'en 2018, moins d'un Français sur cinq (17%) connaissait le montant d'épargne nécessaire au maintien de son niveau de vie à la retraite tandis que 45% avouaient n'en avoir "aucune idée"...

En rendant plus lisibles les montants auxquels chacun pourra s'attendre pour sa retraite légale, payée chaque mois par l'Etat, une réforme des retraites se devrait donc de faciliter le calcul du montant "manquant" que l'épargne personnelle devra venir compenser. Cela aidera les futurs retraités à ajuster leur épargne...

Les retraités confirment que le passage à la retraite a impliqué une perte de niveau de vie

Quelle que soit l'origine de cette inquiétude, les retraités sondés dans notre enquête confirment largement les craintes des actifs : 69% estiment ne pas avoir le même standard de vie que pendant leur vie active, un des taux les plus bas de notre enquête.

Une raison peut, là aussi, tenir à leur manque d'épargne : le Baromètre de l'AMF montre ainsi que seuls 41% des retraités Français ont déclaré en 2018 avoir épargné pour leur retraite avant celle-ci. Parmi eux, un sur deux estiment que cette épargne n'a pas été suffisante...

Qui épargne pour sa retraite ?

L'enquête montre qu'en 2018, 29% des Français ne disposent pas d'épargne, ce qui est proche de la moyenne des autres pays de notre enquête (27%), plus faible qu'en Allemagne (33%) ou au Royaume-Uni (31%) mais beaucoup plus élevé qu'en Italie (24%) ou au Pays-Bas (20%). Quel que soit le pays, environ deux tiers de ceux qui n'ont pas d'épargne sont dans cette situation par manque de revenus. Cependant, l'enquête ING a constaté que les jeunes de 18 à 24 ans disposaient plus fréquemment d'une épargne que d'autres tranches d'âge : 75% en ont, contre 60% des 45-54 ans. Une situation liée aux projets d'achat d'un bien immobilier, souvent acquis plus tard.

Selon le Baromètre AMF, seuls 71% des Français ont mis de l'argent de côté en 2018, et l'épargne pour la retraite (ou en vue d'une perte d'autonomie) arrive en seconde position des motifs d'épargne (après les dépenses imprévues hors santé). C'est donc une préoccupation pour trois épargnants sur quatre.

Parmi les actifs, 20% des Français épargnent régulièrement pour leur retraite, 32% dès qu'ils le peuvent. La plupart (41% des actifs qui épargnent) épargnent moins de 1.000 euros par an, 32% entre 1.000 et 3.000 euros par an. 48% ne mettent donc quasiment jamais rien de côté. Comme dans l'enquête d'ING, le baromètre AMF montre que dans deux tiers des cas, c'est par manque de revenu qu'on ne peut épargner pour sa retraite.

On remarque surtout dans les chiffres de l'AMF que les actifs se préparent tard : parmi les 20% qui épargnent régulièrement pour leur retraite, la majorité ont plus de 55 ans. Les moins de 35 ans sont très peu représentés, alors qu'ils auraient tout à gagner à commencer tôt...

Les Français veulent partir à la retraite tôt, mais plus tard qu'ils ne le font aujourd'hui !

Dans l'enquête ING, les Français pensent partir à la retraite à 62 ans (pour les femmes) et 65 ans (pour les hommes). En réalité, selon l'OCDE, les Français partent à la retraite en moyenne à 60 ans, un des âges les plus bas d'Europe. Il semble donc que les actifs sondés aient l'intention de travailler plus longtemps que leurs aînés. La réforme des retraites devrait les y encourager : la retraite entre 62 et 67 ans sera toujours possible, à un taux minoré en fonction du nombre d'années de cotisation. On remarquera que cet âge est plus bas qu'en Italie (66 ans) ou aux Pays-Bas (67 ans) où les dernières réformes ont été intégrées dans les attentes...

Cependant, si les Français partent en pratique à la retraite à 60 ans, ils sont 38% dans notre enquête à admettre qu'ils ont besoin de compléter leurs allocations par d'autres revenus. Dans un cas sur cinq, c'est en exerçant une fonction temporaire dans le même domaine que celui pratiqué pendant leur carrière ou dans un domaine différent (pour 17% des cas). 5% seulement (des 38%) déclarent avoir un revenu locatif.

Par ailleurs, si les actifs français ont l'intention de partir à la retraite à 65 ans au plus tard, 57% s'attendent à encore devoir avoir des rentrées financières pendant leur retraite pour maintenir leur niveau de vie, c'est donc plus que les 38% observés chez les retraités actuels.

C'est aussi plus qu'aux Pays-Bas (32%) ou en Allemagne (45%), mais un peu moins qu'en Italie (59%). Comme ceux qui sont déjà retraités, les actifs envisagent de poursuivre d'une manière ou d'une autre leur activité présente de manière occasionnelle (30%). Cependant, ils comptent plus que les retraités actuels sur des revenus d'activités immobilières (23%) ou du fait de fonder une entreprise (9%).

Les Français ne trouvent pas que le système actuel soit juste

Les Français ne pensent pas que les pensions versées par le système actuel soient suffisantes : seuls 15% des sondés le pensent et la moitié pensent le contraire . Un Français sur trois n'en est pas sûr. D'autres pays présentent des proportions plus négatives, notamment en Allemagne...

Cela dit, 43% des Français pensent que c'est d'abord à l'état de pourvoir au système de pensions (dans l'enquête cette proportion va de 31% au Royaume-Uni à 52% en Espagne). A l'inverse, seuls 23% des Français pensent que c'est à chacun de prévoir sa retraite avec son épargne, contre 28% des Allemands qui, conscients que le système est insuffisant, semblent trouver normal de compenser par eux-mêmes...

On constate également qu'un Français sur cinq pense que c'est d'abord à l'employeur de le faire, un des taux les plus élevés de notre enquête avec les Pays-Bas (23%). En France, on comptait fin 2017 10,3 millions de comptes liés aux plans d'épargne salariale (généraux comme les PEE, ou spécifiques à la retraite comme les PERCO) mis en place par 315.000 entreprises (dont 310.000 PME de moins de 250 souscripteurs). Les actifs se montaient à environ 15 milliards.

Autant dire que c'est encore loin d'être un dispositif d'épargne retraite si on le compare aux presque 2000 milliards d'euros d'assurances-vie détenus par les ménages français. Il y aurait donc encore fort à faire pour que les employeurs suppléent à la retraite de leurs salariés autrement que par le système général de cotisations.

Vraiment trop injuste ?

Si le système de retraites semble insuffisant à une majorité de sondés dans la plupart des pays, la France est le seul pays où il est en plus considéré comme "injuste". En effet, 54% des sondés pensent qu'ils auront moins de leur retraite que ce qu'ils ont cotisé pendant leur carrière. Un chiffre qui dans l'enquête n'est en moyenne que de 39% dans les autres pays (et est au plus bas à 27%, en Grande-Bretagne).

Un système où une majorité des participants anticipent que leurs allocations seront insuffisantes et pensent y perdre alors qu'il coûte environ 15% du PIB chaque année est probablement appelé à être réformé. Reste à savoir si la prochaine réforme permettra d'évacuer ce sentiment...

Si le système devrait rester un système "contributif" où ce sont les actifs qui financent les retraites de leurs aînés, il devrait néanmoins diminuer le sentiment d'injustice puisque chacun aura une retraite proportionnelle aux nombres d'années qu'il aura cotisé et chacun sera libre de partir plus tôt (pour moins d'argent). De plus, un système de points accumulés au cours de la carrière devrait également rendre plus "lisibles" les montants qui seront disponibles lors de la retraite, aidant ainsi les futurs retraités à se préparer financièrement (en épargnant) à la baisse de revenus qui les attendent lors du passage à la retraite...

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