L’alliance est inédite et de circonstance, mais elle dit l’urgence : Joe Biden a annoncé, mardi 23 novembre, que les Etats-Unis vont puiser 50 millions de barils de pétrole dans leurs réserves stratégiques de 600 millions de barils. Et ils le feront – une première – en se coordonnant avec la Chine, le Japon, la Corée du Sud, l’Inde et le Royaume-Uni, eux aussi mobilisés. Tous ces pays assoiffés de brut cherchent à faire baisser les cours, qui alimentent un retour préoccupant de l’inflation.
Les marchés pétroliers avaient anticipé l’annonce et elle a fait pschitt : le prix du baril de brent pour livraison en janvier a même bondi de 3,27 % (82,31 dollars, soit 73,18 euros) à Londres, celui du west texas intermediate de 2,22 % (78,50 dollars) à New York. En outre, le volume d’or noir libéré est symbolique, même s’il est sans précédent. Il ne représente que trois jours de consommation américaine et une demi-journée de demande mondiale. Quant à la contribution chinoise, elle se limitera à une dizaine de millions de barils et celle de l’Inde à 5 millions.
La décision de M. Biden est d’abord politique. En difficulté dans les sondages, il veut afficher sa volonté de réduire le prix de l’essence, qui a atteint 3,41 dollars le gallon, à la veille de la transhumance automobile de la fête familiale de Thanksgiving (25 novembre). Il a récemment activé un autre levier en demandant à l’autorité de la concurrence d’enquêter « immédiatement » sur « des signes de plus en plus évidents de comportements nuisibles aux consommateurs de la part des entreprises de pétrole et de gaz », n’excluant pas de saisir la justice.
Un « abus », selon l’opposition
Les prix de l’énergie expliquent en partie le retour de l’inflation dont l’éradication est, dit-il, sa « priorité absolue ». Le président américain envoie aussi un signe ferme à l’Arabie saoudite et à l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP). Cette dernière se réunira avec la Russie, le 2 décembre, mais il n’est pas prévu que le cartel OPEP+ (l’OPEP et dix autres pays producteurs) calme les marchés en injectant plus que les 400 000 barils par jour en décembre, conformément à la trajectoire définie en juillet (+ 2 millions de barils sur les cinq derniers mois de l’année).
M. Biden fait-il un bon usage de ces réserves, créées en 1974 après le choc pétrolier qui a suivi la guerre israélo-arabe d’octobre 1973 ? Chaque pays doit stocker l’équivalent de quatre-vingt-dix jours de consommation de brut. Mais puiser dans ces stocks était à l’origine envisagé comme l’ultime réponse à un embargo ou une crise politique. Ils ont été mobilisés lors de la première guerre du Golfe (1991) et du conflit en Libye (2011), mais aussi après l’ouragan Katrina qui a dévasté la Louisiane en 2005.
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