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Green Economie

Cryptomonnaies écolos : un Bitcoin vert est-il possible?

Le Bitcoin est de plus en plus pointé du doigt pour son coût environnemental. Entre énergies renouvelables et évolutions technologiques, des crypto écolos sont-elles possibles?

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Bitcoin et Ethereum, 14 avril 2021.

Alors que le Bitcoin est de plus en plus pointé du doigt pour son impact environnemental, la deuxième crypto-monnaie Ether prévoir de révolutionner son protocole pour réduire sa consommation énergétique.

STRF/STAR MAX/IPx/AP/SIPA

La consommation d’électricité du Bitcoin suffirait à alimenter tout un pays. Selon l’index de l’Université de Cambridge, au cours actuel, le Bitcoin nécessiterait la consommation de 126,28 térawattheure d’électricité sur un an. Plus que la consommation annuelle de l’Ukraine (124,5) ou la Norvège (124,3), et à peu près l'équivalent du minage de l’or (131). 

Car le bitcoin a beau être une monnaie virtuelle, son impact est bien réel, et nécessite lui aussi de "miner". Comme la majorité des cryptomonnaies, le Bitcoin fonctionne avec un protocole de "proof of work", ou "preuve de travail", pour s'assurer que les transactions chiffrées inscrites dans la blockchain sont authentiques. A chaque achat ou vente de Bitcoin, la transaction doit être validée. Pour cela, quelqu’un doit utiliser sa puissance de calcul informatique pour résoudre une équation. C’est le rôle des mineurs. La seule manière de résoudre ces problèmes de maths complexes est d’essayer des combinaisons, jusqu’à trouver la bonne, et donc de faire tourner en continu des ordinateurs les plus puissants possibles. Car seul le premier mineur qui y parvient obtient le droit de valider un bloc de transactions, de l'inscrire dans la blockchain, et se voit récompenser en Bitcoin. Cette méthode de la "preuve de travail" sécurise le réseau, mais est aussi très gourmande en énergie. 

Coût environnemental vs utilité sociale 

"La consommation instantanée du Bitcoin dépend de son cours et fluctue donc beaucoup, explique Hugues Ferreboeuf, directeur de projet numérique au Shift Project. Mais selon différents modèles convergents, il est probable qu’en 2021 le Bitcoin ait consommé entre 100 et 130 térawattheure d’électricité. On ne peut pas ne pas s’en préoccuper." Car qui dit consommation d’électricité dit aussi émissions de gaz à effet de serre. Sans compter que la course à la puissance de calcul encourage les mineurs professionnels à renouveler rapidement leur matériel, toujours fonctionnel, pour des équipements dernier cri. Un coût environnemental qui avait poussé Elon Musk à renoncer aux paiements en Bitcoin. Alors qu'il était possible d'acheter une Tesla avec cette cryptomonnaie depuis mars 2021, le milliardaire avait finalement fait marche arrière en mai pour des raisons écolos, avant de préciser en juin qu'il accepterait à nouveau la devise, quand elle serait moins polluante.

"Le débat sur le coût environnemental du Bitcoin relève d’une incompréhension de son utilité", rétorque Alexandre Stachtchenko, Directeur Blockchain & Cryptos à KPMG France, selon qui le minage du Bitcoin pourrait se substituer au minage de l’or, aussi désastreux pour l’environnement, même si 5 à 10% de cet or sert à l’industrie et donc à la production d’ordinateurs. "Le Bitcoin et l’or sont rares, limités dans le temps et transportables, un switch de l’or vers le Bitcoin est possible", veut croire l’expert. Si la volatilité du Bitcoin le rend peu adapté aux paiements du quotidien, il estime qu’il pourrait servir de réserve de valeur pour de l’épargne de long-terme, notamment dans les pays où les populations sont faiblement bancarisées… théoriquement. Car le consensus social autour de l’or ne semble pas si facilement réplicable. 

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Bitcoin et énergies renouvelables

Et pour l’heure, "le bitcoin s’ajoute, ne se substitue pas aux autres usages", pointe Hugues Ferreboeuf. Le coût environnemental en vaut-il donc la chandelle?  "Il s’agit aujourd’hui un actif surtout spéculatif et dans ce cas, un kilowattheure consommé pour le Bitcoin est un kilowattheure de trop", tranche l’expert.

Le Bitcoin pourrait toutefois améliorer son bilan grâce aux énergies renouvelables, -50% de sa consommation électrique serait déjà d’origine renouvelable selon Alexandre Stachtchenko- et en utilisant l’énergie fatale, aujourd’hui perdue. Parmi les exemples déjà observés, l’Université de Cambridge cite des mineurs en Chine qui consomment les surplus du secteur hydroélectrique pendant la saison des pluies, sans concurrence avec d'autres usages. Aux Etats-Unis, des mineurs tirent aussi profit de l'énergie dégagée par le gaz brûlé lors de l'exploitation pétrolière, faute de débouchés. Les mineurs pourraient ainsi permettre de rentabiliser les investissement dans des énergies renouvelables, en attendant la maturité du marché, à condition que le prix de cette énergies soit assez attractifs.

Des cryptos moins gourmandes

Mais pour beaucoup, la solution serait à chercher dans une méthode alternative de validation des transaction: la "proof of stake", ou "preuve de l'enjeu", adoptée par plusieurs cryptomonnaies plus confidentielles, comme Peercoin ou Cardano. Les transactions sont toujours chiffrées et inscrites dans une blockchain, mais pour les valider, pas besoin de faire tourner des machines énergivores pour résoudre des calculs. Les opérateurs sont autorisés à valider des transaction en échange d'une somme gelée sur un portefeuille spécifique, et sont récompensés en exonération de frais de transaction. C’est une autre méthode aussi sécurisée. Les validateurs ont tout intérêt à protéger l'intégrité du réseau pour ne pas perdre leur somme de départ.

Après sept ans de recherche et développement, la deuxième cryptomonnaie en capitalisation derrière le Bitcoin, l’Ether de la blockchain Ethereum, a annoncé le 18 mai 2021 son intention de passer de la preuve du travail à cette preuve de l’enjeu. Plusieurs fois repoussé, ce changement techniquement très risqué pour le réseau pourrait intervenir dans les prochains mois, aux alentours de l’été, a confirmé le cofondateur d’Ethereum Boris Vitalik  lors de l'événement Ethereum Denvers le 18 février dernier

De quoi réduire de 99,95% la consommation d’énergie de cette crypto, assure l’Ethereum Foundation. "La preuve de l’enjeu permettrait de consommer de 10 à 100 fois moins que la preuve de travail, salue Hugues Ferreboeuf. Même dans la fourchette basse, on tomberait dans quelque chose qui n’est plus hors de proportion."

Alexandre Stachtchenko reste toutefois sceptique: "le proof of stake est encore à l’état expérimental. Il n’a pas encore été adopté par des crypto assez  importantes pour voir s'il marche à grande échelle. Je signe tout de suite pour un Bitcoin plus écolo, mais techniquement, aujourd’hui, ça n’existe pas. Le plus écolo est de consommer de l'énergie renouvelable et de consommer les surplus. Il faut faire le deuil, le Bitcoin est là pour rester."

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